Je commence cette série sur l’écriture de romans avec les toutes premières étapes. Navrée pour ceux qui pensaient se lancer directement dans un torrent d’écriture effrénée : avant de passer plusieurs centaines d’heures sur votre prochain best-seller, il va d’abord falloir trouver l’idée, parce que vouloir écrire est honorable, mais encore faut-il savoir quoi écrire !
Comment trouver une idée de roman (et si possible, de génie) ?
Cela va peut-être vous paraître difficile à croire (et croyez-moi ça m’ennuie autant que vous, ça m’éviterait bien des déboires), mais il n’existe pas de remède miracle ou de potion magique pour trouver l’idée qui fera de vous le prochain Tolkien. Heureusement, cela veut aussi dire que n’importe qui peut en trouver aussi, à condition de prendre le temps de la réflexion et d’être à l’écoute de ses inspirations. A force de penser au fait d’écrire, d’être attentif à son environnement et aux petits détails, nul doute que vous finirez par trouver des morceaux d’idées qu’il faudra petit à petit mettre bout à bout pour commencer à former un concept.
D’expérience, ces idées peuvent venir aux moments les plus incongrus : sous la douche, dans son lit pendant qu’on cherche le sommeil, en marchant, dans le bus ou en faisant la vaisselle. Le tout c’est d’être à l’écoute et, une fois qu’on tient quelque chose, même si ça parait absurde ou ridicule, de le noter. Pourquoi le noter ? Ravie que vous posiez la question. D’abord, parce qu’on peut difficilement se rendre compte d’à quel point ces petites idées disparaissent vite une fois qu’on a arrêté de penser à elles, et ensuite il est difficile de les retrouver. Une fois notées, même si elles vous paraissent stupides à posteriori, vous savez que vous ne les oublierez pas. Et puis parce que ça envoie un petit signal à notre cerveau, lui disant qu’on a écouté ce qu’il imagine et qu’il est sur la bonne voie, pour qu’il continue à en chercher d’autres et à broder autour de ce qu’il a commencé à imaginer. Une idée, ça se construit au fur et à mesure, après tout !
Mais d’abord, c’est quoi une bonne idée ?
Et encore d’abord, de quoi je parle quand je parle d’une idée ? Un roman se constitue d’un grand nombre d’éléments : personnages, histoire, lieux, concepts, situations… et dans le cas de la fantasy d’un univers qui n’est pas celui dont on a l’habitude, de règles différentes, de créatures, etc. (ce qui peut également être le cas pour la science-fiction). Alors les idées que vous aurez trouvées peuvent relever d’une de ces catégories, ou de plusieurs à la fois, mais c’est là que vous comprenez qu’une idée de roman ne se trouve pas en cinq minutes : il faut y réfléchir longtemps pour construire tout ce qui constituera votre roman. Avec une situation seule, on ne peut pas faire un roman, mais ça peut commencer à donner une idée de ce qui constituera les socles de votre histoire.
Cela dit, qu’est-ce qui constituera une bonne idée ? Peut-être que d’autres auteurs qui se sont essayés à l’exercice me contrediront ou me complèteront, mais pour moi, une bonne idée, c’est d’abord quelque chose qui vous plait, qui vous inspire pour créer et qui vous fait vibrer. N’oublions pas (je le redirai souvent, je pense) qu’un roman, c’est des centaines d’heures de travail, alors si vous vous lassez de votre idée au bout de vingt minutes, c’est qu’elle n’était pas si bonne que ça ! A l’épreuve de la durée, elle doit pouvoir tenir, et faire germer des idées secondaires qui vous feront tout autant vibrer. Pour savoir si elle est bonne, rien de mieux que d’y réfléchir et d’essayer de la développer, voir ce qu’on peut construire avec. Et enfin, une bonne idée, c’est une idée personnelle. On dit souvent que tout a été fait, l’originalité ne tient donc pas dans l’idée mais dans sa réalisation (c’est d’ailleurs l’un des principes fondamentaux du droit d’auteur)
D’accord, mais qu’est ce que je fais de mes « mauvaises » idées ?
Ce n’est pas parce qu’une idée ne fonctionne pas toute seule ou bien que vous ne vous sentez pas capable de la réaliser à un instant T qu’elle est mauvaise ! C’est là où les avoir notées (dans un carnet, sur votre téléphone, peu importe, tant que ça vous convient) peut s’avérer bien pratique : elles seront à portée de main dans un mois, un an ou dix et à mesure qu’elles s’accumuleront, elles pourront être liées les unes aux autres dans le but de créer autre chose, ou bien elles pourront évoluer avec votre pratique. Ecrire, c’est aussi de l’entraînement après tout, et l’imagination peut se muscler aussi avec le temps et l’habitude.
C’est justement parce qu’entraîner son imagination à nous abreuver d’idées originales en permanence est à mes yeux primordiale que, quand je suis à court, je me force à quelques challenges destinés à stimuler mon imagination : piocher des mots au hasard dans le dictionnaire et essayer d’écrire un court texte dessus, écrire comme tel ou tel auteur, s’essayer à une forme d’écrit différente ou à des genres différents… Vous pouvez découvrir certains de ces résultats dans les textes que je partage sur ce site. Tout cela peut contribuer à vous redonner de l’inspiration quand vous êtes à court et vous entraîne petit à petit à aborder les idées sous un autre angle. Un autre exercice que j’aime beaucoup pratiquer est de regarder les gens dans la rue, dans le tram ou autre – sans les fixer bien sûr, mais un coup d’œil général – et d’essayer de leur imaginer une histoire. Pourquoi cette femme a-t-elle l’air aussi pressée ? Que va-t-elle faire ensuite ? Que se racontent ces deux personnes ? C’est aussi un exercice qu’on peut faire sans prendre des gens comme sujet : on peut se demander d’où vient l’oiseau qui vient juste de passer, trouver l’origin story de cette fissure dans le mur, ou de cette tasse ébréchée… A force de pratiquer ce genre de petits exercices, cela finit par constituer un bassin d’idées dans lesquelles piocher, ou nous entraîner sur des routes différentes qui peuvent donner des idées de romans, à force.
Un dernier conseil que je donnerais, c’est de lire beaucoup. L’idée n’est évidemment pas de repomper sur les autres camarades écrivains, mais de s’entraîner, de varier les points de vue et les histoires afin de se construire un bloc d’inspirations venues de toutes parts qui peuvent aider à trouver des idées différentes. Et si je conseille de lire « beaucoup » et de nombreux auteurs différents, c’est aussi pour éviter de s’inspirer sans en avoir l’impression : quand on passe du temps à lire un seul auteur, on a tendance, sans s’en rendre compte, à adopter petit à petit sa manière de faire ou de voir le monde, alors qu’en prenant ses inspirations à de nombreuses sources, on évite de tomber dans le piège de l’imitation inconsciente.
Quelques ressources pour aller plus loin
La ressource principale que je risque de conseiller encore et encore dans cette série d’articles est le podcast Procrastination, produit par Elbakin. C’est une mine d’informations sur l’écriture et sur l’imaginaire, animée par des auteurs extrêmement compétents et talentueux (et publiés !) qui m’a accompagnée pendant des mois et me remotivait quand l’envie de baisser les bras me prenait, qui est l’une des sources auxquelles je puise le plus pour construire ma réflexion autour de l’écriture et qui m’a convaincue de l’intérêt, pour un auteur débutant comme je peux l’être, de passer du temps à lire, écouter, regarder tout ce que les auteurs pouvaient avoir à dire sur le travail d’écrivain. Dans le cas de ce premier article sur l’idée, je vous conseille donc d’aller au moins écouter l’épisode 2 de la saison 1, qui traite de ce sujet, ça ne prend qu’une quinzaine de minutes (et peut être quelques heures de plus si, comme moi, vous accrochez au point de vouloir vous en faire un rendez-vous régulier).
Je vous propose aussi d’aller voir un autre point de vue sur ce sujet sur la chaîne Youtube de Christelle Lebailly (une autrice que j’aime beaucoup regarder aussi et qui a fait une certaine quantité de vidéos), qui propose dans cette vidéo plusieurs pistes pour trouver l’inspiration.