Cela faisait très longtemps que j’avais envie de voir cette série, et en même temps, j’en avais peur. Les bonnes séries et les bons films de fantasy sont, selon moi, extrêmement rares. Cela tient, je pense, au fait que ce genre soit considéré comme très grand public – et donc sujet à des limitations et raccourcis scénaristiques utilisés pour mieux vendre (il n’y a qu’à voir ce que disait Tomek Baginski récemment à propos de la série The Witcher, qu’il fallait simplifier pour toucher une audience plus large). Donc, à chaque fois que je regarde de la fantasy, je suis sujette à une pointe d’appréhension. J’ai toujours en tête le désastre et la déception de l’adaptation au cinéma d’Eragon, la pire de toutes les trahisons, selon moi. L’avantage, dans le cas de La Roue du Temps, c’est que je n’ai pas lu le livre et que, mis à part le bien que j’en ai entendu dire, je n’avais même pas pris le temps de lire un résumé.
Une énième histoire d'élu ?
Ah, les prophéties… On en met de partout et à toutes les sauces, en fantasy. On en tartine dès qu’on est à court d’idées, il y en a tellement que ça en devient écœurant. Et à chaque prophétie, son élu – de préférence un homme, hein, et souvent bien moins méritant et intéressant que les autres personnages qui l’entourent – destiné à sauver le monde. Vous l’aurez deviné, ce trope ne remporte pas vraiment mon adhésion. Mais une histoire d’élu bien exploitée, qui parvienne à retourner les clichés, à aller à l’encontre de ce qu’on en attend, pourquoi pas ?
La Roue du Temps se base sur ce trope, mélangé à l’idée de la réincarnation : chacun des humains du monde se réincarne après un temps suffisamment long grâce à la roue du temps, et ça tombe plutôt bien parce que tout le monde attend la réincarnation du Dragon – l’élu, donc – le seul être humain capable de terrasser le Ténébreux, à moins qu’il ne choisisse de s’allier avec lui. Mais comme personne ne sait qui est le Dragon réincarné, il va falloir le chercher, et c’est ce que fait Moirane, une Aes Sedai – une magicienne membre d’un groupe de femmes très puissantes toutes capables de canaliser la magie et ayant dévoué leur vie à la défense du monde – lorsqu’elle débarque à Deux Rivières ou, par chance, quatre jeunes personnes ont les prérequis pour être le Dragon réincarné. Malheureusement, il est impossible de savoir lequel d’entre eux l’est vraiment.
Alors de ce point de vue, la série partait extrêmement mal pour moi. Les mondes manichéens où le bien lutte contre le mal, j’en ai assez soupé, j’ai besoin de plus de contraste que ça, et comme je l’ai déjà souligné, les histoires d’élus, je m’en tamponne l’oreille avec une babouche, comme dirait le nain de Naheulbeuk. J’ai dû m’accrocher pendant plusieurs épisodes pour voir la série commencer à dépasser tout ça, à aller un peu au-delà du manichéisme qu’elle avait établi à coup de burin dès le départ et à faire de cette histoire d’élu quelque chose d’un peu intéressant en entretenant le suspense sur lequel des personnages est véritablement le dragon, voire même s’ils le sont tous les cinq.
Attention spoiler
Surlignez la zone grise ci-dessous si vous avez déjà vu la série ou si vous vous fichez d’apprendre des éléments essentiels à l’intrigue, autrement passez à la partie suivante.
Eet… L’élu est bel et bien le personnage le plus inintéressant de tous, un homme, cela va sans dire, le seul qui n’a pas réussi à me toucher une seule fois dans tout ce qu’il a pu dire ou faire. La série laisse le suspense sur l’intérêt qu’auraient tout de même tous les autres et se ménage une mini porte de sortie pour se dégager du trope dans lequel elle s’est embourbée, mais dans tout les cas le Dragon est celui que n’importe quel fan de fantasy aurait pu montrer du doigt si on lui avait mis une affiche de la série sous le nez, sans rien connaître à l’histoire, en lui demandant juste « à ton avis qui est l’élu ». OUI JE SUIS AGACEE !
Mais finalement, la roue du temps c'est... Bien ?
Dans une série, le scénario ne fait pas tout. L’univers, les personnages – et l’attachement que l’on ressent ou non envers eux – peuvent beaucoup jouer. Dans le cas d’une version filmée, les choix de réalisation, la musique, les décors sont aussi essentiels – tout comme l’écriture et la narration le sont dans les livres. On peut pardonner beaucoup de choses à un scénario, même bancal, si le reste tient la route et arrive à nous accrocher.
Et La Roue du Temps a failli échouer. Juste failli. Les décors sont grandioses, les costumes crédibles, les choix de réalisation efficaces même si peu originaux et la musique souligne suffisamment l’action sans parvenir à avoir non plus l’importance qu’elle peut prendre dans certains autres films – coucou Le seigneur des anneaux. Ce n’est pas un hasard si je mentionne ce film en particulier, puisqu’au début, j’ai craint que La Roue du Temps ne soit qu’une pâle copie de tout ce qui marche dans ce film-là. On a des armées d’orcs – pardon, de trollocks – guidés par des Nazgull – pardon des sans-visage – qui soit dit en passant ne supportent pas de prendre des bains et même un passage de gué avec un bac qui n’est pas sans rappeler une certaine scène d’un certain film. Outch.
Heureusement, la série parvient, après un épisode à haleter ainsi face à la comparaison, à trouver sa propre identité. Les personnages, eux, mettent plus de temps à devenir plus intéressants mais finalement la majorité d’entre eux finissent par prendre de la consistance – pas tous, malheureusement – et nous intéresser à leur sort. La Roue du temps ne sera peut-être pas mon coup de coeur de la décennie, mais elle a quand même réussi à me maintenir accrochée le temps de cette première saison (j’attendrais donc de voir la suivante) et à sortir suffisamment du lot pour apaiser mes appréhensions quand à l’idée d’une énième série de fantasy fade et grand public.
Si vous l’avez vue, qu’en avez-vous pensé ? Avez vous d’autres films ou séries de fantasy à me recommander (d’excellents, cela va sans dire !) ? Racontez-moi tout ça en commentaires ou bien retrouvez-moi sur Instagram pour en parler ensemble.