Je reviens doucement sur ce site avec mon bilan de lectures de décembre très en retard. En plus de la pause que j’ai faite (voir mon post à ce sujet), c’était un mois très fourni niveau lectures et, puisque c’est le privilège quand on est en retard, je peux vous annoncer qu’il en ira de même avec mes lectures de janvier et de février. Un mois un peu en dents-de-scie, avec de jolies lectures mais aussi des romans qui n’ont pas réussi à me toucher, sans doute parce que j’en ai trop lu dans ce genre là et qu’à notre époque, la vision du monde qu’ils véhiculent peut paraître dépassée voire obsolète. Mais j’y reviendrai quand il sera temps d’en parler.
Christopher PriEst, Futur intérieur
J’aime beaucoup les romans qui ont une part utopique et j’avais très envie de découvrir le contenu de cette projection, une idée assez originale et intéressante mais… Eh bien il s’agit d’une utopie pour le bloc occidental de la guerre froide, je suppose : un merveilleux paradis capitaliste ! Une petite ville portuaire touristique… Alors certes, un peu plus incluante que beaucoup de livres de cette époque et avec déjà un début de réflexion sur la pollution mais de toute façon, ce futur projeté n’est pas vraiment le sujet du livre. Non, le sujet, ce sont les scientifiques qui vivent à l’intérieur et qui se détachent peu à peu de leur monde, et surtout cette fameuse menace qui pèse sur la projection, amenée par un élément extérieur en la présence de l’ancien « amant » de Julia (préservons-nous d’amants comme ça) ; un manipulateur toxique prêt à tout pour arriver à ses fins.
Etonnamment, cette relation est le point le mieux traité du roman, avec un traitement assez réaliste de la peur de Julia et de ses tentatives de se protéger, mais, encore une fois, l’époque joue beaucoup car la solution au(x) problème(s) viendra de l’amour. Enfin, d’un homme, quoi, parce qu’une femme n’est évidemment pas capable de s’en sortir toute seule.
En termes de lecture pure et dure, j’ai mis un bon tiers du roman à réussir à me mettre dedans, à cause de longueurs qui ne sont pourtant et malheureusement pas suffisantes pour nous aider à comprendre le fonctionnement de tout ce machin, la multiplication de points de vue dont certains vraiment inutiles perd le propos, le deuxième tiers, allez le deuxième tiers et demi a un peu plus d’enjeux et d’intérêts, mais ensuite le roman se dépêche de clore toutes ses intrigues de façon beaucoup trop accélérée selon moi, ce qui laisse un sentiment d’inachevé. Bref, je m’étais dit que j’allais pour un moment essayer d’arrêter d’emprunter des livres de cette époque parce que j’avais envie de lire des problématiques plus actuelles, mais… eh bien vous allez voir très vite.
Aurélie wellenstein, Le dieu-oiseau
Alric & Jennifer twice, la passeuse de mots, TOME 2, L'oeil de vérité
Heureusement que, pendant toutes ces lectures éprouvantes, je poursuivais la lecture en livre audio de la saga La passeuse de mots, commencée en novembre, avec le tome 2, cette fois-ci. Un peu mieux habituée à l’audio à présent, j’ai réussi à moins facilement décrocher et à être plus régulière dans ma progression, ce qui a joué en faveur de ce tome-là par rapport au premier.
On a toujours un univers qui prend (énormément) de temps pour s’installer – c’est un peu trop, même pour moi qui n’ait pourtant souvent que le reproche inverse à la bouche – avec des descriptions qui cherchent probablement à rivaliser en longueur avec celles de Balzac et qui, si on les mettait bout à bout pour les comparer avec le reste de l’intrigue (ne faites pas ça, c’est stupide) représenteraient sûrement plus de la moitié de ce sacré pavé. Donc oui, ça traîne un peu en longueur parfois, mais ça ne me dérange pas particulièrement. Ce qui me dérange un peu plus, c’est que parallèlement à ça on a des passages qui paraissent importants et sont carrément élidés, donnant l’impression que deux personnages se font soudain la tête pour aucune raison d’un chapitre à l’autre (une partie semble résolue par des flash-back dans le tome 3, mais ça reste déstabilisant).
En revanche, au cours de ce tome 2, le rythme va énormément s’accélérer jusqu’à arriver à un point de bascule important sur la fin, un véritable point de non-retour. Après un début très en douceur et dans la droite ligne de la douceur du tome 1, on finit sur un aspect beaucoup plus sombre et un rythme très rapide, ce qui est très agréable mais, paradoxalement, force la comparaison avec le début du roman et donne l’impression d’encore plus de lenteurs, notamment dans le passage à Sol’Zar qui est particulièrement long. Et, petite fierté personnelle, j’avais senti venir en partie le twist final même s’il a réussi à me surprendre par certains de ses aspects.
Olivie blake, le paradoxe d'atlas (atlas six, tome 2)
Reina aussi a un peu plus de place, ce qui aurait dû me plaire parce que c’était un personnage qui m’intriguait beaucoup, mais on reste sur quelque chose d’assez superficiel, avec une évolution basée uniquement sur un problème de communication avec un autre personnage (faites moi penser à faire un article sur la communication dans les romans et à quel point les quiproquos et autre « j’ai menti pour absolument aucune raison » / « je t’ai pas parlé parce que j’avais un bâillon en scénarium ») me font soupirer fort) et j’attends donc de pouvoir lire le tome 3 pour émettre mon jugement final à ce sujet.
Aurélie wellenstein, Mers mortes
Si besoin était d’une preuve que la plume d’Aurélie Wellenstein m’avait plu dans le Dieu Oiseau, la voici : je suis allée emprunter un autre livre de l’autrice histoire d’en découvrir plus encore. Et sautons tous ensemble de joie : Mers mortes est BEAUCOUP plus accessible que Le Dieu oiseau, même pour des lecteurs assez sensibles. Malheureusement, la plume y est un peu moins fluide et poétique, comme si elle s’était vraiment épanouie dans l’horreur… Mais cela reste une écriture superbe, précise et visuelle, portée cette fois par un thème qui me tient à coeur (et qui selon moi devrait tous nous tenir à coeur) : le changement climatique et ses conséquences.
Résumons : Les mers ont disparu et les fantômes des créatures marines veulent se venger. Le rôle d’Oural est de les exorciser, jusqu’au jour où il est emmené par le capitaine d’un vaisseau pirate vers une lointaine destination…
J’ai du mal à en dire plus parce que le plus gros défaut que j’aie trouvé à ce roman est que le résumé de 4e de couverture en disait beaucoup trop et que la suspension d’incrédulité m’a été très difficile à cause de ça. Déformation d’autrice ? Je ne suis pas sûre que ce soit la seule chose qui joue… En tout cas l’évolution de la relation entre les personnages était selon moi prévisible depuis le début et j’ai eu du mal à ne pas trouver artificielles les réticences du personnage principal.
Côté thématique, on a donc un roman qui mélange post-apo et fantasy, car oui, il s’agit bien de notre monde, des années après qu’il ait été dévasté par le changement climatique. L’approche est originale et fonctionne très bien, nous implique bien davantage que si nous étions dans un univers fictif. De nombreux passages du roman vont nous ramener au début de cette période de changement, aux réfugiés climatiques qui doivent vivre avec les conséquences de la folie des hommes et de leur inaction ; mais le roman apporte un point de vue supplémentaire avec les rêves d’Oural qui le placent dans la peau d’animaux marins torturés par les hommes et lui font ressentir leurs souffrances. Un point de plus pour ce roman qui parvient à dénoncer sans paraître trop pédagogique ni desservir le récit, au contraire.
Pierre Pelot, La Guerre Olympique
Vous vous souvenez du début du mois (enfin du début de cet article), quand j’ai dit que j’en avais marre des romans de la guerre froide ? *toussote* « Publié en 1980… » Ben voilà. Je me suis encore fait avoir.
Résumons : Au XXIIIe siècle, le monde est divisé en deux blocs *pleure* qui, pour ne plus avoir à se faire la guerre et résoudre dans le même temps la surpopulation et la criminalité, ont eu une idée « brillante » : mettre des puces explosives dans la tête de tous les « criminels » de leurs pays et s’affronter dans des jeux sanglants au cours de jeux olympiques. Chaque victoire d’un camp fait exploser une partie des puces de l’autre camp et la victoire finale fait exploser toutes les puces restantes (on parle d’une dizaine de millions). Qu’est-ce qu’on est malins, quand même !
Oui bon, j’avoue que même si j’ai encore râlé sur les deux blocs, l’idée de base était suffisamment originale pour me donner envie de lire, mais comment dire… En dehors de l’originalité de l’idée, il n’y a vraiment rien qui aille. Encore une fois, on ne demande pas aux auteurs du passé de prédire l’avenir mais imaginer aussi peu d’évolutions entre leur temps et le temps de leur récit c’est quand même ne pas faire attention aux évolutions passées, surtout que là on parle de plusieurs siècles de différence qui ne servent à pas grand chose et que ça ne m’aurait pas choquée que l’action se passe en 1990. Mais je peux passer là dessus, la SF est le reflet des préoccupations blablabla… Je vais même passer sur la vision des femmes même si ça m’a sacrément foutue en rogne (parution en 1980, pas en 50 !)
Mais même en concédant tout ce qu’il y a à concéder, j’ai passé un mauvais moment. L’écriture n’a rien de particulier, ni bonne, ni mauvaise, je n’ai rien ressenti en lisant, aucun attachement pour aucun personnage mis à part un condamné politique du bloc occidental qui nous fait ressentir en partie l’injustice de la situation ; l’idée de « et si le sport était politique » pourrait être intéressante mais là c’est la politique qui se sert du sport comme prétexte, comme elle pourrait se servir du crochet ou du scrabble, ça pourrait avoir un intérêt dans la motivation des foules mais de toute façon vu que les opposants politiques se font mettre des puces dans le cerveau dès qu’ils parlent un peu trop fort, l’intérêt se perd vachement. Et puis il n’y a aucune évolution, on nous montre juste le déroulement de cette guerre olympique avec certes une petite péripétie pour ajouter un suspense mais qui ne menace en rien l’équilibre de l’ensemble et donc nous voilà bloqués dans le temps avec d’un côté l’envie de finir vite cette lecture qu’on n’a pas du tout envie de voir s’éterniser et de l’autre l’envie de soupirer très fort à chaque fois qu’on attrape le bouquin pour en lire quelques pages. Bref j’ai failli abandonner la lecture, la seule raison pour laquelle je ne l’ai pas fait c’est que je n’avais pas d’autre livre sous la main pour enchaîner avec une lecture plus plaisante. La plupart du temps j’essaie de trouver aussi des bons côtés mais là je suis désolée, je n’y arrive pas, mis à part « idée de base intéressante » et « écriture pas mauvaise » (mais pas bonne non plus) mais force est de constater qu’à moi, ça ne suffit pas.