Après avoir passé des plombes à me lamenter sur le fait que les séries de SF étaient décidément nettement toutes meilleures que celles de fantasy (et les films aussi !) j’ai fini par demander des conseils sur Instagram et Carnival Row est l’une des séries que l’on m’a conseillées. Bon, en réalité, j’avais vu la saison 1 mais en faisant un peu autre chose en même temps donc je n’étais pas assez concentrée pour l’apprécier à sa juste valeur et entre temps la saison 2 est sortie, ce qui m’a permis de tout regarder d’un bloc. Et de pouvoir dire : OK celle ci est excellente !

Image de "Carnival Row", série Amazon prime Original

Ce que je reproche principalement aux films et séries de fantasy, c’est de nous prendre pour des crétins (n’ayons pas peur des mots). L’immense majorité des adaptations (et même les bonnes adaptations, comme le Seigneur des Anneaux, qui donne un excellent film mais pas fidèle au livre) simplifient absolument tout. Un personnage un peu trop complexe, ambivalent et gris ? Nope, ça va devenir un gentil, un vrai gentil, les gens ne comprennent pas les nuances. Une intrigue un peu trop complexe, un univers un peu trop travaillé ? Nope, ici on veut du simple, alors gommons joyeusement tout ce qui rend le machin plus complexe et faisons en sorte que les cerveaux de nos consommateurs (oui, j’utilise ce mot là exprès) n’aient pas trop à travailler. Après tout, la fantasy, c’est pour les enfants. Les séries de science-fiction sont souvent meilleures, de mon point de vue, parce que nos chers amis anglo-saxons ont eu le mérite de comprendre que ça, en tout cas, ce n’était pas de la sous-littérature, et donc qu’elles méritaient un traitement plus soigné et avaient le droit aux personnages complexes. Côté fantasy, on rame encore, mais Carnival Row promet une légère évolution vers le meilleur (on l’espère).

des personnages moins gentillets

Enfin des personnages qui ne sont pas des caricatures de gentils héros ! Du côté de nos protagonistes on a un ancien soldat qui a abandonné à Tirnanoc (le pays des créatures féériques) sa femme fée en lui laissant croire qu’il était mort ; cette dernière animée par le désespoir et une envie de vengeance ; une jeune fille de la bonne société obsédée par les apparences et – comme la plupart des humains – raciste envers les créatures féériques par méconnaissance, et j’en passe… Alors ils ont tous beaucoup de qualités histoire de compenser tout ça et ils vont tenter de réparer toutes ces erreurs d’appréciation, mais enfin ils ne sont pas entièrement blancs et ça fait du bien de ressentir qu’une partie de l’enjeu provient de personnages qui ont des défauts. Et même les antagonistes s’avèrent ne pas tous être tout à fait des vilains méchants pas beaux. La profondeur psychologique de chacun est assez bien explorée, pas du tout caricaturale, et parvient à être convaincante, ce qui est selon moi un vrai progrès dans l’histoire des séries et films fantastiques, d’autant plus admirable que pour une fois on est face à une série qui ne soit pas une adaptation à l’écran d’un roman mais basée sur un vrai scénario.

Au casting, on a des jolis noms (Orlando Bloom, Cara Delevingne…) et un jeu d’acteur convainquant (petite préférence pour le personnage de Tourmaline interprété par Karla Crome avec une très belle performance) et je ne résiste pas à parler de la coïncidence que mon copain fan de doublage m’a fait remarquer : le personnage d’Imogen Spurnrose, interprété par l’actrice Tamzin Merchant, est doublé en français par Adeline Chetail… qui est également la lectrice de la version audio de la Passeuse de Mots, que j’écoutais durant la même période où je regardais cette série. Voilà, faites ce que vous voulez de cette information mais j’adore cette voix et je n’ai pas pu résister à l’idée d’en parler.

Un univers sombre et bien développé

Carnival Row pourrait être décrite comme de la fantasy victorienne steampunk. Son propos principal repose sur l’exil forcé des créatures féériques de leur pays d’origine pour arriver dans la République du Burgue, gouvernée par les humains qui sont pour une grande partie hostiles à leur présence, et leur tentative de survivre dans un pays qui les rejette, refuse de leur accorder des droits et leur confie les métiers les plus dégradants, les parquant pour la plupart dans un ghetto (le fameux Carnival Row). On a donc une société franchement dystopique (et une dénonciation assez claire de ce qu’il peut se passer dans notre monde à nous) avec son lot de politiciens véreux et de policiers corrompus au milieu desquels l’inspecteur Rycroft Philostrate (Orlando Bloom) tente d’apporter un peu de justice aux créatures féériques qui n’y ont la plupart du temps pas droit. C’est un univers vraiment glaçant mais prenant, plein de magie (noire), qui a tout ce qu’il faut pour me faire entrer dedans et ne pas avoir envie d’en sortir, avec une BO magnifique, un propos fort et des enjeux puissants, une mise en scène et réalisation qui font très bien le taff (sans être non plus transcendantes). Bref, pour une fois je n’ai pas eu l’impression d’être prise pour une andouille et si vous avez envie d’avoir une Chloé contente, sortez moi plus souvent des séries de fantasy de cette trempe là et j’arrêterais (sans doute) de râler.

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