En voilà encore une qui a préféré joué à un vieux jeu plutôt qu’à un récent ! Vraiment, je me fatigue, mais il faut dire que je n’ai pas accroché à une bonne partie des titres récents, donc c’est parti pour vous parler de Control, sorti en 2019.
Un jeu à univers
Dans Control, on incarne Jesse, à la recherche de son frère Dylan, enlevé par le mystérieux FBC (Federate Bureau of Control) à la suite d’un événement d’altération de monde survenu lorsqu’ils étaient enfants. Lors de sa découverte du Bureau, par un concours de circonstances, elle en devient la directrice et doit défendre le bureau contre le Hiss, un ennemi surnaturel qui déforme la réalité. Cette mission lui donne l’occasion d’en apprendre plus sur le Bureau et sa mission, contrôler et confiner les objets de pouvoir ou les objets altérés, des objets dont le fonctionnement diffère et altère la réalité autour d’eux de diverses manières, ce qui rappellera peut-être à certains d’entre nous une certaine Fondation SCP (j’en reparle un peu plus tard).
Control me fournit l’occasion parfaite de parler d’ambiance, de worldbuilding et de lore. Bon, l’ambiance, tout le monde sait ce que c’est, le worldbuilding, j’en ai déjà parlé à plusieurs reprises et c’est l’un des dadas des auteurs de fantasy – la construction d’un monde, en bon français, mais peut-être ignorez-vous ce qu’est le « lore », puisque c’est un terme extrait de l’univers des gamers. Le lore, c’est toutes les informations que l’on peut obtenir sur le monde de tel jeu donné en dehors de l’intrigue et des dialogues de notre personnage. Pour préciser un peu, ce sont tous les éléments de worldbuilding qui vont être cachés dans le monde, qu’il s’agisse de décors, de documents à ramasser ou d’extraits de conversations entre PNJ (personnages non joueurs) saisis au détour d’un couloir. C’est pour cette raison qu’on ne parle, la plupart du temps, de lore que pour les jeux-vidéos, parce qu’il faut pouvoir aller au-delà de la trame linéaire du jeu, ce qui est impossible pour un roman où on ne va vous montrer qu’une partie du worldbuilding qui a été créé pour ce texte. Alors que certains jeux-vidéos, comme Control mais comme plein d’autres jeux, sont des jeux à lore, qui permettent aux joueurs de comprendre le monde en dehors de l’intrigue, d’élaborer des théories à partir d’éléments du décor ou de tout ce que j’ai précisé auparavant, et qui s’étoffe donc sans que les créateurs aient besoin d’expliciter tel ou tel élément. Cela a de nombreux effets positifs, comme accentuer l’immersion (la fameuse ambiance), faire en sorte que les joueurs parlent du jeu entre eux en élaborant leurs propres théories, les impliquer davantage en leur donnant des choses à chercher et donner au jeu une existence qui va au-delà de son scénario.
Et Control est l’un de ces jeux où le lore est fourni et développer et où on pourrait passer des heures à échafauder des théories pour expliquer tel ou tel aspect du monde, ce qui est renforcé par le mystère qui plane autour de son univers (je le sais, on a passé énormément de temps avec mon copain qui y a joué aussi à analyser des détails qui paraîtraient aussi insignifiants que la coiffure du personnage principal). Malheureusement, Control est aussi un jeu à lore qui n’a pas aussi bien marché qu’il l’aurait pu, surtout du côté francophone. Et s’il y a matière à fournir des milliers de théories, les joueurs ne s’en sont pas autant emparés que d’autres jeux.
Control, une inspiration SCP ?
La Fondation SCP est l’exemple typique de la puissance du web. Il s’agit d’un univers tout entier créé par les internautes en écriture collaborative, auquel chacun peut contribuer pour créer tout un univers, auquel Control semble avoir beaucoup emprunté. La Fondation SCP (Secure, Contain, Protect) est un organisme secret fictif chargé de s’occuper des phénomènes surnaturels et de les cacher au public (ce qui fait donc penser au rôle du Bureau dans Control), auquel les internautes contribuent en rédigeant pour le wiki du site et en ajoutant de nouveaux objets ou entités SCP sous la forme de « rapports » comme s’ils étaient rédigés par des membres de cette société. On y retrouve des objets et entités variés et, là encore, on peut faire un parallèle avec Control dans lequel on se retrouvera face à divers objets de pouvoir ou altérés (un post-it qui se duplique à l’infini, un frigo qu’on ne peut pas quitter des yeux, une arme de service qui choisit le directeur du Bureau, etc).
Si l’inspiration est flagrante, Control dispose de ses propres règles et de systèmes qui lui sont propres, tels que le plan astral, qui cohabite avec notre univers ou les EAM (Evénements d’Altération du Monde). Il flirte parfois avec l’horreur, sans s’y raccrocher vraiment, et oscille souvent entre horreur et absurde, avec le comportement des objets et certaines remarques des personnages, notamment des employés du bureau qui travaillent comme si tout était normal autour d’eux et qui n’expliquent même pas à notre personnage devenu leur Directrice ce que son rôle implique et ce qu’elle fait là. Le côté gigantesque et toujours mouvant du Bureau a tendance à ajouter au sentiment d’être parfois perdu et au côté absurde.
Et côté gameplay ?
On va pas se mentir, le début du jeu est plutôt un calvaire. On est sur un jeu d’action à la troisième personne, et le moins qu’on puisse dire, c’est que la maniabilité de notre personnage est catastrophique… au début (mon copain y a joué avant moi et quand il m’a demandé ce que j’en pensais, ma première réponse a été de dire « j’ai l’impression de manœuvrer un camion benne », ce à quoi il m’a répondu « oui mais elle s’accroche pour grimper en hauteur » et donc « j’ai l’impression de manœuvrer un camion benne capable de grimper en hauteur »). Mais au fur et à mesure, on débloque différents pouvoir qui rendent l’expérience nettement plus agréable (l’esquive, un pouvoir de lévitation, etc) et qui nous donnent, de plus en plus, le sentiment de pouvoir maîtriser notre environnement, le contrôler (héhé). Il faut donc s’accrocher pendant le début du jeu puisqu’à cette maniabilité discutable s’ajoute l’impression d’être complètement perdu dans ce bâtiment immense, mais petit à petit on arrive à comprendre ce qui nous arrive, à retrouver notre chemin et les pouvoirs débloqués ajoutent du dynamisme à notre personnage.
Des défauts néanmoins...
Dont le pire de tous : le doublage vraiment très mauvais. En français on a des comédiens de doublage très corrects mais une synchronisation labiale désastreuse (la synchronisation labiale : le fait que les voix prononcent les syllabes au bon moment pour s’accorder au mouvement des lèvres à l’écran, ce qui, quand il est mal fait, donne l’impression d’un décalage entre le son et l’image), mais à priori toutes les autres langues proposées dans le jeu souffrent de ce défaut qui casse vraiment l’immersion dans le jeu. Ça n’a rien d’agréable, surtout avec tous les progrès faits ces dernières années sur ce point technique mais dont n’importe qui est capable de se rendre compte.
Si on ne s’attache pas trop au lore du jeu, dont j’ai parlé plus tôt, on pourra aussi trouver Control assez répétitif (aller dans une zone trouver quelqu’un ou quelque chose, tuer les ennemis, etc), même si, grâce à certains objets altérés, il peut arriver qu’il change un peu (jouer à un deux trois soleil avec un feu de circulation, jouer une scène d’action sur un wagonnet lancé à pleine vitesse, etc.) mais, comme je le disais, c’est finalement l’univers qui entoure ce jeu qui le rend intéressant, bien plus que son gameplay qui ne casse pas trois pattes à un canard ou ses graphismes OK-tiers.