Je continue à séparer mes lectures du mois en deux articles, publiés les 1ers et 2e samedi du mois, pour qu’ils soient le plus digestes possibles. Si en mars j’avais séparé entre lectures initiales/relectures, ce mois-ci la distinction sera plutôt entre nouvelles acquisitions et « ceux qui traînent dans ma bibliothèque depuis des temps immémoriaux » (dont une relecture). Un mois assez inégal, dans l’ensemble, en termes de lectures. Mais entrons dans le vif du sujet.

Anna Triss, La guilde des ombres, TOME 2 La grande traque 

Anna Triss, la Guilde des Ombres, tome 2 La Grande Traque, publié chez Pocket

J’avais parlé du premier tome de La guilde des ombres en février, une lecture qui m’avait bien plu et pour laquelle j’avais senti un potentiel de coup de coeur, même s’il lui avait manqué quelque chose. J’avais donc hâte d’enchaîner avec les tomes suivants afin de voir si le coup de coeur se débloquait et… eh bien malheureusement, non.

Ce tome dispose des mêmes qualités que le premier, un style vraiment poétique et agréable à lire, un monde froid et sombre, sans merci, toujours aussi prenant et des personnages qui se dévoilent peu à peu et évoluent au fil du temps, j’éprouve surtout un grand plaisir à retrouver Beladyn, sans doute le seul personnage vraiment sain de cette histoire, drôle et loufoque à souhait. 

Mais le problème, c’est que ce tome-ci est surchargé, dès les premières pages, de scènes de sexe très explicites et très nombreuses qui m’ont mise plus mal à l’aise qu’autre chose, sachant que la « romance » (entre gros guillemets) est déjà extrêmement malsaine sans cela (pour le coup, ce côté-là est un parti pris qui me semble assumé par l’autrice et qui est fréquemment dénoncé pour qui sait lire entre les lignes, ce qui est tout à son honneur et change des relations toxiques présentées comme normales dans d’autres romans, je n’accuse personne suivez mon ACOTARegard)

Mais pour en revenir aux scènes de sexe, je ne suis pas forcément contre (l’un de mes romans préférés, La marque de Kushiel, en est rempli car l’intrigue est basée dessus), seulement ça change énormément du tome 1 qui n’en contenait presque pas et surtout comme je le disais elles sont très explicites et le personnage masculin est extrêmement vulgaire (sans doute moins que dans d’autres romans mais comme je ne suis pas lectrice de ces romans là je peux difficilement comparer). Là, on rentre dans les goûts personnels et les goûts et les couleurs, vous savez… en ce qui me concerne, ça m’a mise mal à l’aise, je préfère les romans où elles sont édulcorées par un peu de poésie. Je trouve aussi que ça a tendance à couper un peu l’intrigue, ou au mieux, à lui faire faire des détours, c’est un parti pris aussi de mettre la « romance » au premier plan dans ce tome-ci je pense, mais ce parti pris me fait un peu sortir du public cible car je préfère les romans où la romance reste à l’arrière-plan et où le sexe est moins explicite et moins omniprésent. Mais si ce n’est pas quelque chose qui vous dérange (et en étant bien conscients que la relation est toxique af), la Guilde des ombres est une saga extrêmement bien écrite, à l’intrigue prenante et bien menée et je vous le recommande chaudement. 

(il y a aussi un autre point qui m’a fait sortir du roman à la fin, l’émergence d’un archétype narratif que je n’avais pas vu venir et que je déteste parce que trop utilisé, mais je n’en dirai pas plus pour ne spoiler personne).

Maurice Pons, Les saisons

Maurice Pons, Les Saisons, aux éditions Christian Bourgeois éditeur

EN PARLANT D’ÊTRE MAL A L’AISE.

Difficile de savoir comment aborder et présenter Les Saisons de Maurice Pons. Ce n’est clairement pas un roman que je recommanderai à n’importe qui mais c’est aussi un roman qui est devenu culte pour de nombreux lecteurs et qui ne laissera sans doute personne indifférent. Pour ma part, on me l’a offert en cadeau en me prévenant « c’est le roman le plus bizarre que j’ai jamais lu », et je crois que je suis d’accord avec ce qualificatif. 

Bizarre, étrange, absurde, sombre et dérangeant. Extrêmement bien écrit, mais surtout bizarre.

Et qui met clairement plutôt mal à l’aise aussi. J’ai même du mal à décrire son genre, que je qualifierai peut-être d' »absurde sombre » si je devais lui coller une étiquette, mais il ne ressemble à rien de ce que j’aie pu lire auparavant, avec un personnage d’écrivain qui fuit un monde horrible pour débarquer dans une vallée cachée où seules deux saisons se succèdent, la pluie et le gel et où il espère enfin pouvoir écrire son roman, mais s’enfonce peu à peu dans une damnation qu’il n’a ni méritée, ni vue venir, avec des personnages qui mangent uniquement des lentilles parce que rien d’autre ne pousse, qui se réchauffent l’hiver en s’attachant des animaux vivants contre la peau et qui s’engoncent dans un quotidien morne au point de ne plus accepter l’inconnu et le nouveau et de s’éclater des boutons comme si c’était un sport national.

Ce n’est clairement pas un roman à mettre entre toutes les mains, mais je suis quand même contente de l’avoir lu et d’avoir découvert cet « autre chose » indéfinissable que représente ce roman, même si ce ne sera sans doute pas un de ceux que je garderai sur ma table de chevet.

JK Gras, Laure Enza, Mélodie Smacs, Coline Dumas et Sarah Calman, Le sortilège de la lune noire 

JK Gras, Laure Enza, Mélodie Smacs, Coline Dumas et Sarah Calman, Le Sortilège de la lune noire, aux éditions Le Héron d'argent

Quand je me suis décidée à lire ce livre, j’avais un peu d’inquiétudes : j’ai beaucoup de mal en général avec la fantasy qui se passe à notre époque, dans notre monde (la low fantasy, donc), parce que je vois souvent la fantasy comme un moyen de m’évader de ce quotidien, que je n’ai pas envie de retrouver dans mes lectures. Ceci dit, ici, le quotidien est envoyé aux oubliettes à partir de la première page du livre et notre monde tout entier se transforme en un univers différent, modifié par le sortilège jeté par une des sorcières de ce roman, par amour, et qui risque bien de l’anéantir. Une espèce d’apocalypse magique, qui laisse cinq jours aux personnages pour tenter d’y mettre un terme.

Le Sortilège de la lune noire, c’est une histoire commune, cinq personnages (cinq sorcières) pour la vivre, écrits par cinq autrices différentes, qui convergent toutes vers un même point en subissant les mêmes changements en même temps que les autres, dans ce monde qui s’effondre petit à petit. Et en dehors de la maîtrise et de l’organisation qu’il faut pour écrire ce roman à cinq en respectant des règles communes, ce qui m’a vraiment bluffée, j’ai été tout aussi impressionnée par la façon dont chaque autrice a réussi à s’approprier ces règles pour créer son personnage, son histoire et son cadre de vie au sein de cette organisation commune, permettant de faire émerger un tout organique qui fonctionne très bien.

J’ai quand même été un peu frustrée par le découpage, forcé par ce choix d’écriture, qui ne laisse qu’un cinquième du livre à chaque autrice pour développer son propre point de vue sur l’intrigue, en plus du rythme effréné donné par ces 5 jours pour tout changer, mais ça, c’est une nouvelle fois parce que j’aime les univers et les histoires qui prennent leur temps et que je les préfère aux page-turners. J’ai beaucoup aimé découvrir ces cinq sorcières aux magies, aux motivations et aux histoires très différentes, tout autant que les lieux desquels elles viennent, et j’ai vraiment dévoré ce roman (en essayant de me limiter à une partie/autrice/personnage par soir). 

C’est tout pour cette première partie, je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour la seconde partie de mes lectures, dans des genres très différents de ce dont j’ai l’habitude de parler et avec un classique de chez classique.

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