Quand on écrit dans l’espoir d’être publié et qu’on ne cherche pas à s’autoéditer, il arrivera forcément un moment où on aura des retours suite à une participation à un appel à textes, ou bien des retours de maison d’édition… et parmi ceux-là, je vous souhaite d’en avoir des positifs, mais il y en aura presque obligatoirement aussi des négatifs, et c’est de ceux-ci que je veux parler aujourd’hui, parce qu’à force, je commence à pas mal les cumuler et je connais très bien la frustration et le découragement que ça peut générer. Du coup à force j’ai trouvé quelques parades pour les gérer et je me suis un peu renseignée.

Il existe trois sortes de refus : les refus-type, c’est-à-dire ceux qui prennent le temps de répondre pour dire que le texte n’est pas accepté mais enverront la même réponse à toutes les personnes dont le texte sera refusé ; les refus argumentés, ceux qui vous donneront de précieux conseils pour vous améliorer (inutile de préciser que ce sont les plus importants mais qu’ils sont très rares) et ceux qui sont les plus durs à encaisser : les absences de réponse après une deadline fixée à l’avance.

L'absence de réponse

Les refus par absence de réponse se sont généralisés ces dernières années, face au nombre de plus en plus important de manuscrits envoyés aux maisons d’édition qui ont donc de moins en moins de temps pour les lire (pour les appels à texte, vous aurez souvent au moins droit à un refus généraliste, parfois en envoi groupé avec tous les autres refusés). Ils sont souvent annoncés dès la page de soumission du manuscrit : si vous n’avez pas de réponse après tant de mois, considérez que votre roman est refusé… En cause, le nombre de plus en plus important de manuscrits envoyés aux maisons d’édition et le temps limité dont elles disposent pour les lire.

Symptômes face à ce type de refus : déni, découragement, impression que le livre n’a pas été lu ou qu’on ne mérite même pas de recevoir une réponse.

Remèdes : se rappeler que la page de soumission indiquait clairement qu’il n’y aurait pas de réponse si le manuscrit était refusé, mais que cela ne signifie pas qu’il n’a pas été lu, ni qu’on a démérité au point de ne pas avoir droit à sa réponse.

L’absence de réponse est devenue si fréquente que je finis par trouver que ce n’est pas si décourageant que ça, c’est juste… normal. A condition, évidemment, que ça ait été précisé à l’envoi du manuscrit, ainsi que le nombre de mois à attendre avant de se considérer comme refusé. Il peut arriver de ne pas recevoir de réponse sans que ça n’ait été annoncé auparavant, et dans ce cas-là on continue à espérer pendant des mois, voire des années, en se disant que peut-être le manuscrit en question est toujours quelque part sur un bureau, voire en train de servir pour caler un meuble. Dans ces cas-là, il s’agira peut-être dans un premier temps de se renseigner sur des forums d’écriture pour savoir si les refus par non-réponse sont courants chez cette maison d’édition, et si la réponse est négative, d’essayer de relancer poliment l’éditeur pour demander s’il y a un délai de lecture après avoir attendu le délai initial s’il était précisé, et de se décider à lâcher prise au bout de ce nouveau délai.

A noter : même s’il s’est généralisé au point d’être devenu la norme, c’est celui qui nous donne le plus l’impression de ne pas exister, surtout si la maison d’édition n’envoie pas non plus d’accusé de réception à l’envoi du manuscrit. Dans ce cas-là, on a un peu tendance à avoir l’impression de s’être adressé à une boîte mail abandonnée… mais les maisons d’édition lisent évidemment ce qu’elles reçoivent pour déterminer si les textes peuvent être édités chez eux, ce n’est donc qu’une impression. Sauf qu’ils sont très nombreux à être débordés – genre vraiment débordés – et que leur travail consiste avant tout à éditer des textes, pas à rassurer ceux qui ne le sont pas. Dans un monde idéal, ils auraient le temps de répondre et je suis persuadée qu’ils préféreraient pouvoir le faire, mais quand ils reçoivent des milliers de manuscrits dans l’année, parfois sans que leur ligne éditoriale n’ait été correctement vérifiée, on comprend que c’est un temps qu’ils ne peuvent pas se permettre de prendre (à moins de mettre en place un système automatique d’envoi de mail de refus, ce qui m’amène au deuxième point)

Le refus-Type

Celui-ci est souvent tout aussi dur à avaler que le précédent, parfois plus. Au moins, pour l’absence de réponse, vous saviez à quoi vous attendre, mais avec le refus généraliste, vous avez le droit à quelques phrases qui ne sont pas spécialement adressées et vous laissent dans le flou : « malgré toutes ses qualités, votre manuscrit… », « ne correspond pas à notre ligne éditoriale », « merci d’avoir pensé à nous mais », « après lecture par notre comité, nous sommes au regret de vous annoncer… », etc. 

En tant que jeunes auteurs, on n’est pas forcément au courant que ce type de refus existe à moins de s’être bien renseigné (j’ai découvert l’existence de ce procédé assez tard).

Symptômes face à ce type de refus : frustration, sentiment d’être noyé dans la masse, parfois un peu d’espoir injustifié en pensant qu’il ne s’agit pas vraiment d’un refus-type (spoiler : si on se pose la question, c’est que c’en est un)

Remèdes : comme pour l’absence de réponse, se rappeler dans un premier temps que ce n’est pas contre vous et que ça ne remet pas en question la qualité de votre texte (et encore moins vos qualités personnelles), seulement le fait que cette maison d’édition-là ne pourra pas (pour plein de raisons) défendre ce texte-ci à ce moment donné. 

Pensez aussi que gérer les refus, ça se fait aussi avant même l’envoi : essayer de préparer le meilleur dossier de soumission possible, soigner son texte et vérifier qu’il correspond en tous points aux critères précisés par la maison d’éditions (certaines veulent du word ou du pdf, une police, un interligne et une taille spécifique, demandent pitch et/ou synopsis, lettre d’intention etc. pour accompagner le roman) de sorte que votre texte ne soit pas simplement rejeté parce que vous avez utilisé du Arial 11 au lieu du Times New Roman 12, ce serait vraiment dommage. 

Même avec un dossier de soumission parfait, il faut aussi penser à vérifier la ligne éditoriale de la maison d’édition (c’est souvent un des arguments donné dans les lettres de refus-type) en lisant certains de leurs romans avant envoi, en allant vérifier leur catalogue sur leur site web, etc. On n’envoie pas de fantasy à une maison d’édition spécialisée dans la poésie et on n’envoie pas non plus de dark-fantasy à une maison d’édition qui a clairement spécifié qu’elle était spécialisée dans la fantasy jeunesse. Beaucoup de romans (un pourcentage énorme, si j’en crois les chiffres que j’ai vu circuler sur les réseaux) sont refusés justement parce qu’ils ne correspondent pas à la ligne éditoriale des maisons d’édition, et dans ces cas là c’est frustrant pour tout le monde : les éditeurs qui perdent du temps à étudier des soumissions qui ne leurs sont pas destinées, les auteurs qui perdent du temps à attendre une réponse d’une maison d’édition qui sera forcément négative (il n’y a pas de « sur un malentendu ça peut passer » : un éditeur accepte un texte qui correspond à ce qu’il veut publier et qu’il sera en mesure de défendre. Si votre texte est accepté « sur un malentendu », il vaudrait sans doute mieux fuir) et ça fait perdre du temps aux auteurs qui, eux, ont vérifié la ligne éditoriale de la maison d’édition et pourraient être acceptés si l’éditeur ne perdait pas de temps avec des textes qui ne lui correspondent pas. 

Et oui, c’est extrêmement frustrant de recevoir un refus « ne correspond pas à notre ligne éditoriale » alors qu’on a bien vérifié qu’on correspond, qu’on a lu des oeuvres de la maison etc., malheureusement, c’est comme ça que fonctionnent les refus-type. Ils n’expliquent pas ce qui n’a pas marché, mais ils prennent la peine de vous dire que ça n’a pas marché et voyez le comme ça. Comme un « non » poli, à défaut d’un « non » argumenté.

Un cas particulier qui me fait râler : la pub pour une plateforme d’autoédition.

Je suis capable d’encaisser tous les refus, depuis le temps, mais il y en a toujours un qui me fait particulièrement grincer des dents : c’est le refus-type qui vous propose un code de réduction pour vous faire éditer via une plateforme d’autoédition. Il y a des maisons d’éditions (rares, mais elles existent et sont dans de grands groupes éditoriaux, pour la plupart) qui sont en partenariat avec ce type de plateforme et pour qui le refus-type est le moment parfait pour placer une pub. J’imagine que le partenariat impose certaines clauses de ce type, que ce n’est pas mal intentionné, je peux comprendre qu’elles puissent avoir besoin de ce type de partenariat au niveau financier, et c’est de la pub pour de l’autoédition, ce qui est une façon tout à fait valable de se faire publier et pas de l’arnaque. 

Mais. Ça me pose malgré tout problème. Un gros problème, même. Parce que quand on reçoit un refus pour un texte (sur lequel on a travaillé des centaines d’heures, qui est un fragment de nous même si on essaie de dire l’inverse) on devient vulnérable. Peu importe à quel point on rationalise, ça porte un gros coup à notre égo et à notre moral. Et certes, ces publicités ne sont pas de l’arnaque, mais l’autoédition, ce n’est pas une option que l’on envisage sur un coup de tête après avoir reçu un coup dans l’égo, c’est une décision qui doit être mûrement réfléchie en fonction de tout ce qu’elle implique (un gros investissement financier mais aussi en temps, une bonne connaissance de tout ce qu’il faut faire pour publier un livre, en termes de communication, d’administratif, de création, de corrections, etc. L’autoédition ça peut être très bien, mais il faut savoir dans quoi on s’embarque, particulièrement pour de jeunes auteurs mal renseignés) et placer une pub pour de l’autoédition après un refus peut engager quelqu’un (de fragilisé par ce refus) à se lancer sur une piste sans l’avoir mûrement réfléchie au préalable et donc, sans que ça ne puisse réellement marcher. C’est dans ce sens là que cela m’agace, d’autant plus que quelqu’un qui a fait des démarches de soumissions auprès de maisons d’édition n’est à priori pas dans la même optique et dans la même démarche que quelqu’un qui a envisagé cette voie-là et a pris le temps de mûrir son projet pendant des mois. Je ne jette absolument pas la pierre aux maisons d’édition qui le font, mais je pense néanmoins que placer une publicité à ce moment-là du parcours de soumission n’est pas la solution la plus judicieuse.

A ne pas faire : se plaindre des refus-types par retour de mail ou répondre pour demander une argumentation alors qu’il avait été spécifié que la maison d’édition n’en aurait pas le temps. Il parait que c’est fréquent. Les maisons d’édition n’ont pas le temps de faire des retours argumentés à tout le monde et le précisent souvent sur leur page web de soumission. 

Les refus argumentés

Le Saint-Graal des refus. Et je n’exagère même pas : c’est tellement rare d’en recevoir que si vous en avez un, vous pouvez déjà être certain que votre texte a été lu, qu’il a été suffisamment apprécié pour qu’on prenne la peine de vous dire ce qui ne va pas dedans et qu’on veuille vous permettre de vous améliorer et d’avancer. Il faut le considérer comme un honneur, et là je n’exagère même pas. C’est la dernière étape avant l’acceptation, après tout : votre travail a été pris en considération. Les maisons d’édition qui le font pour certains textes seulement sont sans doute intéressées pour travailler par la suite sur d’autres projets avec l’auteur qu’elles honorent ainsi et lui font ce retour pour lui permettre de s’améliorer et de recevoir un « oui » de leur part plus tard. Certaines autres maisons d’éditions le font plus souvent et il est aussi plus facile d’obtenir ce type de refus dans le cadre d’appels à textes, pour des nouvelles par exemple (certains demandent à l’envoi de demander si l’on souhaite obtenir un retour qui se présentera sous la forme d’une fiche rédigée par le comité de lecture, mettant en avant les points forts et les points faibles du textes et j’aurais tendance à conseiller d’en faire la demande à chaque fois qu’on vous le propose : c’est une vraie mine d’or pour progresser, même si, selon le retour, ça pique un peu sur le coup, mais autant en profiter pour s’habituer aux critiques).

Symptômes à envisager avec ce type de refus : fierté, sentiment d’avoir été lu et pris en considération, volonté renouvelée de progresser

Je crois vraiment qu’il faut considérer un refus argumenté comme une chance et l’apprécier à sa juste valeur. Un « non » fait toujours mal, mais un « non » tel que celui-ci ouvre des portes plutôt qu’il n’en ferme. Il faut accepter sa déception, oui, mais savourer la considération qu’on nous porte. 

Conseils d'une "habituée"

On ne s’habitue jamais vraiment à recevoir des refus. Certains peuvent faire moins mal que d’autres, comme je l’ai souligné plus haut, mais c’est toujours un déchirement de recevoir ces « non », parce qu’au tout début, les premiers qu’on reçoit nous font tomber de haut, à force on a l’impression d’arriver à s’en détacher mais s’ils s’accumulent et s’ajoutent à d’autres aléas de la vie (n’importe lesquels, de la fatigue, d’autres soucis, etc.) on peut facilement repasser dans l’état de découragement qu’on ressentait lors des premiers refus. Voire pire, et se demander si tous ces refus ne sont pas un signe pour nous pousser à ne pas persister dans
cette voie-là. C’est normal de ressentir ça, et c’est aussi un sentiment à ne pas rejeter. Mais il ne doit pas nous pousser à abandonner. Gardez l’abandon pour le cas où l’écriture deviendrait un sentiment d’obligation, une souffrance plutôt qu’un plaisir. Tant qu’on a envie de raconter des choses et même si on accumule des centaines de refus, il faut tenir bon et continuer de chercher ceux qui seront prêts à lire ce qu’on a à dire.

Ecrire, c’est aussi persévérer.

N’oublions pas que beaucoup de grands écrivains ont aussi commencé par recevoir des centaines de refus.

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